La première étape est de trouver un nouveau look pour redynamiser les cartes : un visuel sympa, attrayant et punchy qui pourra être repris pour l’exposition. Ce n’est pas une mince affaire sur un format si petit. Après de nombreux allers-retours entre nous et notre graphiste (d’une très grande patience, soulignons-le), nous concevons un motif aux couleurs vives qui nous enchante. En plus, il pourra facilement se décliner sur des grands supports pour égayer notre future production.

Deuxième étape : la création de l’expo. Nous commençons par réfléchir à ses objectifs et à ses destinataires. Assez vite, nous nous mettons d’accord. C’est certainement la partie la plus facile ! Faire découvrir les pédagogies actives aux néophytes et aux (futur-e-s) professionnel-le-s de l’éducation. Déconstruire les stéréotypes. Susciter la discussion sur l’éducation, la société, les pratiques. Provoquer l’envie d’en savoir plus et de se former pour transformer ses pratiques et son quotidien. Et, surtout, dépoussiérer et rendre plus sexy les pédagogies actives. Le tout dans un format itinérant pour toucher le plus de gens possible.

Ensuite, il faut envisager sa forme générale. Là aussi, nous nous surprenons. Guidé-e-s par l’experte du groupe (et ses fameux schémas), les cartes nous servant de supports, nous parvenons en moins de temps 

qu’il n’en faut pour le dire à visualiser globalement l’exposition. Elle sera découpée en zones qui déclineront : les origines des pédagogies actives et leurs praticien-ne-s, leurs destinataires, leurs méthodes, si ça fonctionne, leurs connexions avec la société actuelle. On complète par une zone d’entrée et une de sortie où les personnes feront des liens avec leur vie quotidienne et leurs pratiques professionnelles.

Pour nous, les visiteurs et visiteuses doivent repartir avec l’idée que les pédagogies actives, c’est mieux et c’est praticable. Elles-ils doivent aussi pouvoir emporter des pistes pour les guider dans leurs expérimentations, et aussi nous laisser une trace de leur passage et de leurs réflexions.

Maintenant, tout est à créer ou presque ! On se remue les méninges en groupe pour croiser envies, contenus, supports et matériaux. On cherche l’inspiration en chinant sur le grand internet. On visite d’autres expositions, notamment celle du Musée du Capitalisme /1 où l’on rencontre de chouettes gars qui nous donnent conseils, infos, idées et astuces (merci à Samuel, Benoît et Thomas). Après cette visite, tout s’éclaire. Les zones se construisent dans nos têtes et sur les krafts. Et à chaque fois que nous nous rassemblons, l’exposition avance : les recherches s’affinent, les textes se rédigent, les témoignages se récoltent, le mobilier se construit, les visuels prennent vie. Et ça nous plaît ! C’est assez excitant. Stressant aussi, parce que nous nous rendons vite compte que nous avons été un peu ambitieux et ambitieuses. Nous nous sommes engagé-e-s à présenter l’exposition en août chez nos copines et copains français-es, au 55e Congrès de l’ICEM à Bétheny, près de Reims, et puis à celui des CEMÉA France à Poitiers. Il faut que l’on soit prêt-e-s ! Et le temps file. En plus, des relectures à (re)faire, de nouvelles idées surgissent : « Une bâche pour présenter les CEMÉA ! », « Des cartes postales à emporter pour les pistes ! », « Il nous faut un présentoir », « Et si on créait une table pour présenter les contre-idées ? », etc.

Puis, on y est. Il faut envoyer les fichiers à l’impression. En attendant le tirage du Saint Graal, on rassemble le matériel nécessaire aux structures, aux finitions, au transport. On rédige des inventaires, des plans de montage et démontage en s’inspirant du grand ébéniste suédois. On planifie le rangement dans les caisses, on bricole, on colle des étiquettes, des gommettes, du velcro. On coud, on ponce, on compte, on fait des paquets d’élastiques, on plastifie. Heureusement, les collègues sont là pour nous donner des coups de pouce (parfois, même de marteau) et nous encourager. Sans eux-elles, on n’y serait peut-être pas arrivé-e-s.

Enfin, le moment attendu arrive. On découvre les grandes bâches et les panneaux forex. Et c’est beau ! Nous voilà tout-e-s ému-e-s ! Mais pas le temps de nous congratuler, on doit déjà essayer de faire tout rentrer dans la camionnette pour le premier rendez-vous de l’expo. C’est là que nos entraînements Tétris ont payé. Merci Nintendo ! Car faire tenir 500 kgde matériel de formats différents dans un espace clos, ça demande de la compétence et des efforts. Tou-te-s ceux et celles qui étaient présent-e-s s’y sont mis-es. Nos bras et la voiture ont tenu bon. Tout est rentré (on avait même encore un petit peu de place).

Et nous voilà parti-e-s pour Reims. On ne s’attardera pas sur l’après-midi de montage. On avouera juste que l’on a beaucoup, mais beaucoup, sué... et découvert de nouveaux muscles ! Heureusement, sur place, les copains et copines d’Educ Pop, mais aussi des participant-e-s et des membres de l’organisation du Congrès, nous épaulent. Dans cette grande salle lumineuse, l’exposition se met en place, petit à petit. Pour nous, c’est assez étrange comme sensation, un mélange de fierté, d’excitation et de fatigue... C’est la première fois qu’on la voit en vrai, montée. On n’imaginait pas qu’elle était aussi imposante (à notre échelle, bien sûr). Ça a de la gueule, ça en jette ! Déjà, certain-e-s s’enthousiasment devant nos productions. Quelques personnes commencent à manipuler et à discuter. Des commentaires emballés se font entendre. On repart laissant l’exposition vivre le congrès.

Dès le lendemain, les échos de Reims nous parviennent. Nos objectifs semblent atteints : les visiteurs et visiteuses échangent, touchent, s’essayent, lisent, apprennent... Waouh ! Quand on revient, quelques jours plus tard, chercher l’exposition pour l’emmener à Poitiers, les gens nous félicitent. Même chose chez nos camarades des CEMÉA en France. L’exposition fait sensation. Personne n’imaginait que nous arrivions avec un truc de cette ampleur. « Vous êtes fous, les Belges ! » « Nous, il nous aurait fallu 10 ans pour la réaliser. » « Elle est belle et moderne. » Philippe Meirieu nous glisse même à l’oreille, dans un couloir : « Merveilleuse, votre expo ! » Et ça fait du bien, car, on ne va pas se mentir, cette épopée n’a pas toujours été joyeuse et facile. Créer une exposition, c’est un métier, différent du nôtre. Ça exige de réfléchir autrement.

De sortir de nos schémas habituels, tout en gardant notre identité. Il faut allier pédagogie avec communication, graphisme et pragmatisme. C’est pourquoi, collaborer avec des volontaires indulgent-e-s qui possèdent des compétences et un regard neuf est si nécessaire et bénéfique. C’est certainement ce qui nous a permis d’aller jusqu’au bout, sans diminuer nos ambitions. Merci Charline. Merci Davor. Mener ce projet de A à Z a été ardu, passionnant et dévorant. La suite va l’être tout autant puisqu’il s’agit maintenant de le faire vivre en Belgique et, peut-être, ailleurs !

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