En twittant ce slogan lors de la Semaine Mondiale de l’Allaitement 2016, l’Unicef-France s’était attiré de nombreuses critiques, qui jugeaient le message culpabilisant pour les femmes ne souhaitant, ou ne pouvant pas, allaiter. Au-delà de l’anecdote, cet épisode révèle de vives tensions qui opposent, d’une part, des associations ou institutions oeuvrant à la promotion de l’allaitement, et d’autre part, des personnes – ne faisant souvent pas partie d’organisations – qui critiquent les discours qui l’entourent. Les premières mettent en avant des enjeux de santé publique, l’intérêt des familles et des enfants, et réduisent souvent les critiques à des manipulations des entreprises fabriquant les laits en poudre. Les secondes, pourtant, ne remettent pas nécessairement en cause l’allaitement en tant que tel, et ne sont pas réductibles à des lobbies, mais s’alarment des messages qui ne prennent pas nécessairement en compte les situations personnelles et particulières des mères et des ménages auxquels ils s’adressent.
L’allaitement touche à des enjeux multiples et à différents niveaux : il questionne l’individu (la mère, son ou sa partenaire), la famille, le corps médical, les services publics de santé, les institutions internationales comme l’Unicef et l’Organisation Mondiale de la Santé, ou encore l’Organisation Internationale du Travail. L’allaitement n’est assurément pas, aujourd’hui, « qu’une affaire de femmes » : il implique effectivement beaucoup de monde.
Aborder les questionnements liés à l’allaitement à travers des oppositions binaires (santé publique contre intérêts industriels, intérêt collectif contre intérêts individuels de certaines mères...) masque la complexité du sujet et de ses enjeux. Au niveau des individus, il existe des raisons variées d’opter pour l’allaitement maternel ou pour le lait en poudre ; elles se fondent à la fois sur le vécu personnel et sur le positionnement social, économique... À un niveau plus large, les décisions prises à propos de la santé publique (mais également, par exemple, de la législation du travail) révèlent des influences contradictoires et donnent lieu à des discours souvent paradoxaux.
Dans cet article, nous nous penchons sur des questions que soulèvent les discours sur l’allaitement et, par conséquent, sur la place laissée aux femmes dans la définition de leurs propres choix. Le but n’est pas de poser un jugement sur les raisons qui poussent une femme à choisir ou non d’allaiter, ni sur les manières de le mettre en pratique. Cependant, nous avons voulu mettre en lumière le contexte dans lequel les femmes sont amenées à effectuer ce choix. Celui-ci est-il suffisamment exempt de pressions (sociales, économiques, organisationnelles...) pour qu’il puisse être, dans la majorité des cas, effectué de manière autonome ? En d’autres termes, les conditions sont-elles suffisantes pour que les mères puissent décider, sans être fortement pénalisées pour leur choix, quel qu’il soit ?
Un discours public orienté sur des bases contestables
Un des éléments frappants dans les affirmations en faveur de l’allaitement, c’est l’omniprésence des références à la recherche scientifique pour le promouvoir, sans que les sources, en revanche, soient toujours précisément citées. L’allaitement aiderait à être en bonne santé toute sa vie et aurait des effets bénéfiques sur les infections gastro-intestinales, l’asthme, les allergies, la pression sanguine, le cholestérol, l’obésité, le diabète, il garantirait même une intelligence accrue… Pourtant, ces « faits » ne sont pas définitivement établis. Comme nous allons le voir, la plupart sont aujourd’hui remis en question, soit parce que les conditions de réalisation des études précédentes ont été jugées insuffisantes par d’autres équipes de recherche, soit parce que des études ultérieures ne sont pas parvenues à reproduire les mêmes résultats.
Il est, en effet, complexe d’évaluer l’impact de l’allaitement dans les études, toutes choses égales par ailleurs – c’est-à-dire de mesurer les effets de l’allaitement tout en neutralisant l’influence de l’éducation, l’hérédité, l’alimentation ou la pollution, bref, du milieu dans lequel grandit l’enfant. C’est néanmoins possible. Ainsi, en 2014, une étude portant sur des données récoltées sur 25 ans, ne comparant que des frères et soeurs (afin de neutraliser les autres facteurs dus au milieu, notamment l’éducation), a conclu que l’allaitement n’avait pas d’influence significative en ce qui concerne 11 des 12 effets étudiés, qui incluaient l’obésité, l’asthme, l’hyperactivité, l’attachement, les allergies, le cholestérol, le diabète (1)… Les études concernant le QI présentent également des résultats contradictoires (2).
Les corrélations statistiques peuvent exister, sans que cela suppose l’existence de liens de causalité. Ainsi, le lien entre allaitement et revenu à l’âge adulte, employé comme argument pro-allaitement notamment par Unicef- France, montre simplement que les femmes ayant un revenu plus élevé sont plus susceptibles d’allaiter que la moyenne nationale (3). Nous posons comme hypothèse que cette tranche de la population est davantage en mesure de négocier des pauses d’allaitement et peut plus facilement se permettre d’allonger le congé de maternité par des congés parentaux… Plus qu’autre chose, cela interpelle sur l’influence des déterminants socio-économiques en matière de choix pour les familles, ici par rapport à l’allaitement.
Pourtant, l’OMS continue, sur son site, de parler d’avantages pour la tension artérielle, le cholestérol, le diabète, l’intelligence (4) ; en Belgique, le SPF Santé publique parle même d’effets sur l’attention à l’école (5). Et appuient ainsi leurs recommandations : allaitement exclusif jusqu’à 6 mois, et complémentaire jusqu’à 2 ans. Il est frappant que des institutions internationales, influençant ensuite le discours d’institutions nationales, semblent si peu prudentes par rapport à ce qu’elles annoncent comme étant des « preuves scientifiques ». Difficile de se sentir légitime pour faire un choix différent, quand tout semble converger vers l’idée que ne pas allaiter aura des effets négatifs pour son enfant, à court et long terme. Comment ce discours est-il devenu omniprésent, en dépit des résultats modestes et contradictoires de la recherche ?
L’allaitement et la figure de la « bonne mère »
Les discours relatifs à l’allaitement ont connu d’importantes variations ces dernières décennies, et sont inextricablement liés aux discours entourant la maternité et la figure de la « bonne mère ». Ainsi, dès les années 1800, des manuels de conseils destinés aux femmes mettent en avant l’allaitement maternel. Le débat, à l’époque, n’oppose pas le lait maternel au lait artificiel, mais l’allaitement par la mère à la « mise en nourrice » (6). Ces dernières, généralement issues de milieux pauvres, sont payées pour nourrir d’autres enfants que les leurs, souvent né-e-s de milieux bourgeois (7). À partir du 19e siècle (8), l’invention de la figure de la femme au foyer, conséquence de la révolution industrielle, participe à cette idée : les femmes se doivent d’allaiter et chaque mère d’allaiter son propre enfant. D’une part, parce que c’est, en tant que femme, son « devoir sacré » : ainsi, en replaçant la femme au centre de son foyer, la société la transforme en gestionnaire des tâches ménagères et domestiques au service de l’homme réduit, lui, en esclave de la production. D’autre part, parce que l’on craint que le lait des nourrices ne transmette à l’enfant des « vices » considérés comme populaires. À la domination de genre s’ajoute ainsi une domination classiste : le lait des femmes de classe aisée est considéré comme étant de qualité supérieure.
Ce n’est que dans les années 1950 qu’est mise au point une formule de lait en poudre plus adaptée aux besoins des nourrissons et productible en masse. À l’époque, juste après la Seconde Guerre mondiale, aux États-Unis et en Europe, le lait en poudre commence à être perçu comme la meilleure option, à l’inverse de l’allaitement, devenu tout à coup rétrograde. Les mères qui connaissent des difficultés à allaiter sont parfois diagnostiquées d’un nouveau « syndrome », celui du « lait insuffisant » (9) et sont orientées vers les laits en poudre, sans forcément prendre le temps de s’assurer que cela leur convient. L’idéologie qui pousse à cette transition est celle de la science triomphante, du modernisme, du progrès technique, mais aussi celle de la marchandisation de notre quotidien. Ce que l’on peut vouloir de meilleur pour son enfant est redéfini comme étant le produit le plus scientifique et technique : le lait artificiel.
Toutefois dans les années 1970, des groupes de femmes commencent à s’opposer à cette vision des choses. Il s’agit avant tout de mouvements féministes qui se rebellent contre l’idée d’un corps féminin dépeint comme incompétent, devant être assisté par la science (grossesse, accouchement, maternité, ménopause...). Ces mouvements veulent redonner confiance aux femmes dans leurs capacités, notamment dans leur dimension corporelle. Leurs revendications s’inscrivent également dans le cadre plus large des critiques de la société de consommation, et des mouvements prônant un retour à plus de simplicité et plus de naturel. Un autre mouvement de protestation est issu de groupes de chrétiennes, qui défendent une vision de l’allaitement comme étant le dessein de Dieu pour les femmes, ainsi d’ailleurs, que la maternité et le fait de rester au foyer (10). Alors que les premières prônent le libre choix des femmes et que les deuxièmes encouragent une vision très traditionaliste de son rôle, elles se rejoignent paradoxalement sur le thème de l’allaitement.
À la même période, des études commencent à mettre en avant les bénéfices de l’allaitement (11). L’OMS et l’Unicef emboîtent alors le pas de la promotion du lait maternel, en particulier dans les pays en développement. Les années 1980 semblaient avoir fait preuve d’une relative tempérance envers les choix des mères occidentales concernant l’allaitement ; au cours des années 1990 et 2000, le discours ambiant, soutenu par les instances internationales et nationales devient plus pressant. Mais il n’y reste plus grand-chose des revendications féministes et anticonsuméristes des années 1970.
En effet, aujourd’hui, il semble que c’est une vision essentialiste qui prime : dans certains milieux pro-allaitement, une femme qui souhaite nourrir son enfant au sein est considérée comme étant à l’écoute de « sa nature », tandis qu’une mère qui ne le souhaite pas est soupçonnée d’être manipulée par la société, l’industrie pharmaceutique… ou tout simplement d’être égoïste (12).
Essayer de la faire changer d’avis est donc vu comme justifié. Pourquoi des réactions si différentes devant ces deux choix ? Il semble illusoire de soutenir que l’allaitement « demeure un choix personnel », si tout le reste (discours institutionnel, médical, grand public) culpabilise les mères qui ne le font pas.
Parallèlement, et à nouveau en contraste avec les revendications féministes sur la corporalité des femmes des années 1970, de nombreuses femmes ont fait les frais des pressions en matière d’allaitement dans l’espace public, se voyant sommées de quitter restaurants, boutiques… où elles voulaient allaiter leur enfant, ou rencontrant des difficultés sur leur lieu de travail pour tirer leur lait (13). Allaiter, oui, mais en privé, dans la discrétion.
Allaiter pour l’économie : théories et pratiques néolibérales
L’allaitement continue d’être présenté comme une pratique « simple » et « naturelle ». Il n’est pas rare non plus de lui trouver des justifications écologiques : le lait maternel « est écologique, car il ne laisse aucun déchet et ne nécessite aucun transport » (14). Pourtant, dans les faits, cette pratique est aujourd’hui largement teintée de notre société capitaliste et consumériste. Il existe un marché de l’allaitement, avec ses marchandises (tire-laits, sacs de conservation, soutiens-gorges et coussins d’allaitement, suppléments alimentaires pour stimuler la lactation…) et l’émergence de professions spécifiques (comme les « conseiller‑e‑s en lactation » qui ont, pour certain-e-s, suivi une formation continuée en lactation en humaine (15)). Loin de la critique du technicisme des années 1970, on recherche aujourd’hui des « expert-e-s » en la matière.
De manière troublante, l’intégration de logiques managériales et du vocabulaire qui en découle, se fait sentir dans le discours de mères elles-mêmes, en particulier dans la classe moyenne16. Allaiter devient un « projet » à « gérer », qui nécessite des recherches extensives sur la manière de le mener à bien. Les mères sont encouragées à préparer un « plan » où figureront déroulé prévu et objectifs à atteindre en termes de « production » de lait par rapport à la « demande ». De nombreux conseils (17) existent pour « augmenter » leur production tout comme de nombreuses « applis » existent pour les y assister (18). Dans les groupes de mères, certaines, loin d’y trouver le soutien recherché, témoignent y avoir ressenti une telle pression qu’elles préféraient mentir aux autres participantes sur la quantité de lait qu’elles étaient parvenues à tirer. La quantité de travail et d’auto-discipline que suppose l’allaitement lorsqu’il est vécu de cette manière, et la pression vécue par celles qui s’y engagent, apparaissent immenses. Comment ne pas se sentir incompétente et coupable lorsque, malgré toutes ces « aides », une femme décide d’arrêter d’allaiter ou de ne pas allaiter du tout ?
Cette teinte néolibérale donnée aux discours sur l’allaitement ne se fait pas seulement sentir du point de vue des individus et de leurs pratiques. Ainsi, le bien-être de la mère est largement éclipsé par celui que l’on désire pour son nourrisson, mais il ne s’agit nullement d’un souhait désintéressé ou gratuit : derrière l’enfant se profilent parfois les intérêts de l’entreprise et de l’État. Ainsi, plusieurs études, tenant pour acquis le lien avéré entre allaitement et QI, se sont interrogées sur l’effet de l’allaitement sur la productivité des futur‑e‑s employé-e-s d’entreprise, et partant, sur le PIB de leurs États. Une étude de 2016, promue sur le site de l’OMS, n’hésite pas à affirmer que « l’allaitement renforce l’économie » : « les gains économiques de l’allaitement [s’élèveraient à] 302 milliards de dollars, grâce à l’augmentation de productivité associée à une intelligence plus élevée (…) La diminution annuelle des coûts de santé [totaliserait] presque 400 millions aux États-Unis, Royaume-Uni, Brésil et Chine urbaine ».(19)
Les critères pris en compte ici sont donc des questions de QI, de PIB et de réductions en investissements (« dépenses ») dans la santé publique. Apparemment, personne ne s’intéresse à modéliser les implications sur la vie des millions de mères concernées par ces discussions, autant au niveau économique que psychologique, si chacune d’elles devait prendre des dispositions pour allaiter son enfant pendant deux ans. Les femmes génèrent pourtant une part très importante du PIB mondial ; ces études le nient en considérant qu’il n’y aurait aucune perte économique à ce que toutes les femmes allaitent. Cette grille d’analyse néolibérale n’a rien de moderne. En effet, elle renvoie les femmes à un modèle hérité du 18e siècle : celui de la mère dédiée à la maternité, exclue de la sphère professionnelle pour les besoins de la famille. À l’inverse des revendications féministes qui cherchent à faire reconnaître l’importance du travail domestique dans l’activité économique mondiale, nous nous retrouvons dans un modèle inverse : le temps des femmes est considéré comme gratuit. Comme si la seule influence positive qu’elles pouvaient avoir était d’espérer engendrer des enfants ayant un QI plus élevé...
En route pour un « vrai » choix ?
Aujourd’hui, en Occident, il n’est plus forcément bien vu de choisir d’être femme au foyer. Mais alors, comment s’en sortir ? Car dans notre société, un discours dominant plane : pour être considérée comme une vraie femme, il faut être mère. Pour être une bonne mère, il faut allaiter, mais le faire discrètement, ne pas déranger. Pour être une femme moderne, il faut savoir mener en parallèle carrière et maternité. Et puisque les femmes ont voulu travailler, il ne faudrait pas qu’elles sollicitent ce qui serait perçu comme un « traitement de faveur » : des aménagements (pour les horaires, les pauses d’allaitement, les lieux pour tirer le lait…). Si l’on résume : pour être une femme vraie, respectable et moderne, il faut avoir un enfant (ou deux), garder son travail, ne pas demander d’aménagements, rester productive et disponible aux tâches confiées… ET allaiter à la demande, pendant deux ans ! Comment se dépêtrer de ces injonctions contradictoires, et comment démêler ce que l’on veut pour soi en tant que femme de ce que l’on estime être de son devoir de mère ?
L’allaitement aujourd’hui concerne beaucoup de monde et est remisé au rang de quelque chose de privé, d’intime, qui « va de soi », où l’analyse politique n’a pas sa place. Pourtant, l’allaitement est bien une pratique sociale, tout comme une question politique, car la conception que l’on s’en fait touche à la place des femmes - et des hommes - dans la société. Il touche aussi à l’image de la famille et du rôle de chacun-e en son sein. Si nous voulons que les femmes puissent faire un choix, un vrai, et donc être autonomes dans leur quotidien de mère, il est grand temps de réagir.
Il s’agit, tout d’abord, de mener un énorme travail de déconstruction des stéréotypes autour de la « bonne mère », de la « vraie femme » et du « vrai homme », du « vrai couple parental » pour ouvrir, enfin, les modèles disponibles et permettre à chacun-e d’être la mère, le père, la femme, l’homme, le-la partenaire qu’il-elle a envie d’être en dehors de tout rôle prédéfini. D’autres modèles existent, à la fois dans notre société (20), et dans d’autres cultures (21) ! Ce travail de déconstruction doit s’appliquer à tous les niveaux, mais il doit commencer dans la sphère publique : les images et les mots utilisés par les institutions nationales, par les politiques, mais aussi par la publicité, la presse... doivent proposer d’autres exemples, différentes manières de faire et d’être. Ainsi, si d’autres modèles s’affichent, ils pourront petit à petit investir la sphère privée et l’enfermement des femmes et des hommes pourra s’assouplir. Évidemment, ce n’est qu’une première étape dans ce vaste chantier vers une réelle autonomie du quotidien.
La place, l’attitude, le rôle et la disponibilité du ou de la partenaire sont essentiels dans le choix que les mères peuvent, ou pas, poser sur la question de l’allaitement, comme sur bien d’autres d’ailleurs. Toutefois en Belgique, comme dans beaucoup d’autres pays, le rôle du-de la partenaire parental-e, ainsi que le « travail » de la mère, sont peu reconnus. Pour que les femmes et leurs partenaires puissent choisir en fonction de leurs envies, besoins ou nécessités, mais également puissent « vivre » leur choix, il est nécessaire que les charges, mentales ou effectives soient d’abord reconnues et ensuite réparties entre eux-elles. En Norvège ou en Suède, pays où le taux d’allaitement, au-delà des 6 mois, est le plus élevé22, nous constatons qu’une vraie politique familiale soutenante a été mise en place pour permettre un modèle où les deux conjoint-e-s peuvent décider de travailler et où les possibilités de répartition des charges parentales existent. Pour cela, plusieurs dispositifs ont été pensés et, surtout, opérationnalisés : une offre de services et d’aides publiques importante pour les familles, un niveau d’emploi féminin très élevé et un congé parental long, devant être obligatoirement distribué entre les deux parents (23). Les intentions et les décisions politiques ont donc un impact direct sur notre vie et sur notre quotidien.
La question de l’allaitement interroge nos fonctionnements de manière globale, de nos choix et comportements au quotidien jusqu’aux rapports de domination culturels, politiques, économiques, qui régissent la société actuelle. Cette perspective nous offre de multiples possibilités d’actions individuelles (le regard que je pose sur une femme en train d’allaiter, l’écoute pour celle qui le voudrait...) ou collectives (participation à des mouvements associatifs, citoyens, choix électoraux tenant compte des propositions qui concernent les politiques familiales plus ou moins égalitaires...).
Si nous souhaitons un véritable changement pour les femmes et pour les hommes quant à leur liberté d’agir, de choisir et d’être propriétaire de leurs propres corps, nous devons être vigilant-e-s à promouvoir une éducation qui favorise l’autonomie réelle et la prise en compte de chacun-e, afin d’avoir une action transformatrice à tous les niveaux et sur du long terme.
1 / Cynthia G. Colen, David M. Ramney “Is breast truly best ? Estimating the effects of breastfeeding on long-term child health and wellbeing in the United States using sibling comparisons”, Social Science & Medicine, Vol.109, May 2014, p. 55-65. [http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0277953614000549] 2 / Carolyn Y. Johnson, “The breastfeeding story is more complicated than you think”, The Washington Post, 23/02/2016. [https://www.washingtonpost.com/news/wonk/wp/2016/02/23/what-youve-read-about-breastfeedingmay-not-be-true/] 3 / Taux d’allaitement maternel à la maternité et au premier mois de l’enfant. Résultats de l’étude Épifane, France, 2012/ Breastfeeding rates in maternity units and at 1 month. Results from the EPIFANE survey, France, 2012. 4 / OMS, « 10 faits sur l’allaitement maternel », Août 2017. [www.who.int/features/factfiles/breastfeeding/fr/] 5 / SPF Santé publique, « Pourquoi l’allaitement maternel est-il important ? », 14/03/16. [https://www.health.belgium.be/fr/allaitement-naturellement/allaitement-naturellement-pourquoi#article] 6 / Lucile Laurent, « L’allaitement maternel : Évolution des pratiques et recommandations actuelles », Université de Lille, 2016. 7 / Claude Fischer, « Breastfeeding history », Septembre 2011. [https://madeinamericathebook.wordpress.com/2011/09/21/breastfeeding-history/] 8 / Viviane Gonik, « L’invention de la femme au foyer », Le Courrier, 19/09/17. [https://www.lecourrier.ch/152700/l_invention_de_la_femme_au_foyer] 9 / Gussler, J.D. ; Briesemeister, L.H., « The insufficient milk syndrome : A biocultural explanation », 1980. 10 / Un groupe créé à cette époque aux É.-U. est aujourd’hui proéminent dans la promotion de l’allaitement : il s’agit de La Leche League, qui a essaimé dans plus de cinquante pays. 11 / Julie E. Artis, « Breastfeed at your own risk », Contexts, vol.8 n° 4, 2009. [http://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1525/ctx.2009.8.4.28] 12 / Mirah Curzer, « On breastfeeding – my body, my choice », 3/08/16. [https://thecoffeelicious.com/on-breastfeedingmy-body-my-choice-6ce8d5b9611c] 13 / Eve Gratien, « Couvez ce sein que je ne saurais voir : quand l’allaitement en public dérange », Le Nouvel Obs’,4/04/12. [http://leplus.nouvelobs.com/contribution/518228-couvrez-ce-sein-que-je-ne-saurais-voir-quand-lallaitement-en-publicderange.html] 14 / Naître et Grandir, « Allaitement : les bienfaits du lait maternel », Mai 2017. [http://naitreetgrandir.com/fr/etape/0_12_mois/alimentation/fiche.aspx?doc=naitre-grandir-allaitement-maternelavantage] 15 / Cette formation est dispensée par différentes Hautes Écoles, par exemple, la Haute École Libre de Mosane [https://www.helmo.be/CMS/Formation-continuee/Paramedical/Lactation.aspx] ou la Haute École de la Province de Namur [http://www.hepn.be/formation_approfondie_en_lactation_humaine_et_allaitement_maternel]. 16 / Orit Avishai, « Managing the Lactating Body : The Breastfeeding Project in the Age of Anxiety », in Pranee Liamputtong (ed.), Infant Feeding Practices, Springer, 2011, p.22-38. [http://www.newbooksservices.de/MediaFiles/Texts/2/9781441968722_Excerpt_001.pdf] 17 / Massages des seins [https://www.nutriciababy.be/fr-be/bebe/allaitement/stimuler-l-allaitement/], ingestion de certains aliments [http://naitreetgrandir.com/fr/etape/0_12_mois/alimentation/fiche.aspx?doc=naitre-grandir-alimentationpendantallaitement], prises de plantes [http://sante-medecine.journaldesfemmes.com/contents/2387-plantes-pour-lallaitement], hydratation, repos... 18 / Emily Elling, « 9 Must-have breastfeeding apps », https://www.babble.com/baby/9-must-have-breastfeeding-apps/ Des applications permettent par exemple d’enregistrer la durée de chaque pause d’allaitement, et de calculer moyennes journalières et totaux ; la mère peut y noter le sein auquel son nourrisson a tété en dernier ; d’autres encore proposent de stimuler la lactation en regardant des photos de son nourrisson sur fond d’enregistrements de cris de bébés en colère ! 19 / « The Breastfeeding Series », The Lancet, 20/01/16. [www.thelancet.com/series/breastfeeding] On notera que la formulation du site de l’OMS est plus menaçante, car elle attire l’attention sur des pertes actuelles plutôt que sur un gain potentiel : « Les pertes économiques globales dues à des capacités cognitives plus faibles, lesquelles sont associées à l’absence d’allaitement, ont atteint plus de 300 milliards de dollars en 2012, soit 0,49 % du produit intérieur brut mondial. » OMS, « Increasing breastfeeding could save 800 000 children and US$300 billion every year », 2016. [http://www.who.int/maternal_child_adolescent/news_events/news/2016/exclusive-breastfeeding/en/] 20 / Ainsi, une étude auprès de mères étasuniennes a montré que les femmes Afro-Américaines étaient plus promptes à remettre en question l’allaitement exclusif. La plupart des femmes de ce groupe interrogées ne se sentaient pas du tout coupables du fait de ne pas allaiter ; au contraire, elles mettaient en avant le fait de vouloir impliquer les frères, soeurs, et la famille élargie, à travers l’usage du biberon, afin de renforcer la place de chacun-e et les liens familiaux. Voir Julie E. Artis, « Breastfeed at your own risk », op.cit. 21 / Par exemple, chez les Akas du Congo-Brazzaville et de République centrafricaine, les nourrissons tètent leurs pères – car la fonction nourricière n’est pas seulement liée à l’allaitement, mais est aussi affaire de proximité des corps, du temps passé ensemble. Voir Sandrine, « Les Akas, ethnie des hommes qui « allaitent » leurs bébés », 18/10/17. [https://nofi.fr/2017/10/akas-hommes-allaitent-bebes/44150] Dans une ethnie du sud-ouest de la Chine, appelée Moso, ce sont les hommes qui s’occupent des enfants, 10/12/17. [http://www.madmoizelle.com/societes-matriarcales-monde-286441] 22 / Bénédicte Foix, « État des lieux et perspectives de l’allaitement maternel en France et dans le monde », pp. 131-133, 2014. 23 / En Norvège, 59 semaines à répartir entre les deux parents dont 10 à prendre obligatoirement par chaque parent. En Suède, 68 semaines dont 9 pour chaque parent. [http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2012/10/05/97001-20121005FILWWW00362-14-semaines-de-conges-pour-les-peres.php] [https://fr.wikipedia.org/wiki/Politique_familiale_su%C3%A9doise] promouvoir une éducation qui favorise l’autonomie réelle et la prise en compte de chacun-e, afin d’avoir une action transformatrice à tous les niveaux et sur du long terme.
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