Que l’on soit bien compris.
Il ne s’agit pas de revendiquer ici un quelconque déterminisme lié aux premières années de vie (qui pourrait aller jusqu’à des diagnostics prédictifs tels que les a dénoncés la plateforme (Pas de 0 de conduite), mais bien de plaider pour une approche de la petite enfance quiappuie le développement de l’enfant, lui permet de grandir et de se réaliser en sécurité.
Le principe d’éducabilité, tout au long de la vie, doit constituer un postulat de départ. Un des principes d’action des CEMÉA rappelle d’ailleurs que « Chacun, chacune a le désir et les possibilités de se développer et de se transformer ».
Les articles qui suivent constituent un parcours aux points de vue et horizons variés, explorant différents registres de l’approche du jeune enfant. Des références –notamment et naturellement- piklériennes, des balises autour de la motricité libre, de l’attachement, de la posture professionnelle, de l’alimentation...
Des questions aussi sur le regard porté sur l’enfance, l’école dans l’accueil qu’elle offre aux plus jeunes, les assignations de genre qui impactent les relations enfants/parents. Des questions plus politiques enfin, sur la structuration du secteur de l’enfance et son évolution, les dispositifs de formation qui s’y déploient, la récupération de la petite enfance par la société de consommation de masse...
Pour qui s’intéresse au champ de la petite enfance, probablement que ce recueil n’ap-portera guère de « révélations », bien qu’il œuvre à articuler les dimensions pratiques, politiques et sociétales. Si l’on se réfère en effet à l’approche piklérienne, elle date du mi-lieu du siècle passé. Le courant de l’Éducation 5Nouvelle -plus généralement- est quant à lui vieux de plus d’un siècle. Est-ce pour autant que ses principes sont advenus dans l’éduca-tion au XXIe siècle ? La réponse est négative.
Pourtant, les initiateurs et initiatrices de l’Éducation Nouvelle, dans l’effervescence de l’entre-deux guerre, pensaient qu’il faudrait une ou deux générations maximum pour que ce modèle éducatif s’impose partout et parti-culièrement dans l’école. Force est de consta-ter que le discours a percolé, mais bien trop peu les actes et le sens. L’enfant au centre, certes, mais considéré sous quel angle ? Comme un animal à dresser ou apprivoiser, comme une tête et un corps à remplir, un futur consommateur à domestiquer ? Ou comme un être en développement doué de désir ? Objetd’éducation ou sujet d’éducation ?
Si les systèmes d’éducation à visée huma-niste, progressiste et émancipatrice peinent à advenir, ce ne peut être la seule faute à « Pas de chance ». C’est bien qu’il y a des résistances, des forces contraires, des op-positions franches ou plus discrètes qui ne souhaitent pas nécessairement des enfants qui vont bien, créatifs, debouts et affirmés, capables d’investir le monde qui les entoure et de le transformer.
Il y a donc une manière d’envisager les en-fants et l’enfance en général qui ne les consi-dère que comme des êtres en devenir, pas encore « finis » avant leur capacité de vote, les disqualifiant dans leur réalité et contexte immédiats, les reléguant au statut d’héritiers d’une société qu’ils devraient prendre telle qu’elle est, se conformant –sans broncher- aux besoins et nécessités des adultes. C’est du point de vue des adultes que l’on parle de « garde » des enfants plutôt que d’accueil. Du point de vue des adultes encore qu’il faut envisager les rythmes scolaires, et du point de vue des adultes aussi que souvent, l’art ou les filières professionnelles ne sont pas suffi-santes pour garantir sa place dans la société.
Porter un regard sur l’enfance, c’est ini-tier une démarche culturelle qui nomme le monde, le sens de ses orientations et de son histoire.
Nous espérons que les articles qui suivent permettent à chacun-e de s’armer pour écrire une autre histoire
L’Éducation Nouvelle en Mouvement
Réflexions, questions & mises en perspective
« Ce qui se construit avant 3 ans »
Avril 2018
SOMMAIRE
L’approche piklérienne, une ressource pour les CEMÉA
Liberté de bouger... liberté d’être
Se rencontrer soi-même avant de rencontrer l’autre
Et puisque l’on mange aussi à la crèche
S’attacher pour se séparer en toute sécurité
L’école à deux ans et demi, une équation insoluble ?
De homo sapiens à homo consommabilis
L’instinct maternel ou « La fête des mères »
L’allaitement n’est pas qu’une affaire de femmes
Spécificités de la formation des professionnel-le-s en Petite enfance aux CEMÉA
L’accueil collectif de la petite enfance : un enjeu de société qui peine à advenir