Pour croiser les regards et les expériences, la conception de la rencontre et son animation étaient réalisées en partenariat avec deux autres associations : Empreintes d’une part, une organisation de jeunesse active dans l’Éducation à l’Environnement, et d’autre part, les CEMÉA France qui ont apporté leur soutien à différents moments de la conceptualisation du week-end.
Les objectifs de la Fabrique d’idées étaient de deux ordres
- Vivre de l’activité en lien avec l’Éducation relative à l’Environnement et, comme à notre habitude, prendre un temps pour revenir sur nos vécus, en lien avec nos représentations, dans le but d’élargir notre vision de la notion « d’environnement ».
- Questionner nos pratiques en lien avec nos principes : Y a-t-il toujours congruence ? Quels sont les enjeux lorsque l’on parle d’environnement aujourd’hui ? Pour quelles perspectives et quelles orientations ?
Aller dehors, le juste milieu
Après nous être réuni-e-s le vendredi soir pour poser le cadre de la rencontre, créer le groupe et partager les attentes, nous avons accueilli Gaëlle et Annick d’Empreintes le samedi. Le programme du jour : être dehors. Pas évident quand il fait un froid de canard ! Emmitouflé-e-s, nous sortons pour vivre des activités. Certaines se rapprochent de ce que nous faisons aux CEMÉA, d’autres moins. Nos sens sont appelés à s’éveiller. Vision, écoute, odorat : les activités s’enchaînent dans les bois de la Marlagne. Une tisane de ronces vient à point nommé nous réchauffer et ensuite, nous enterrons des déchets dans le but de voir leur décomposition à travers le temps. Il est midi, nous rentrons pour manger au chaud. L’après-midi, nous vivons une kermesse-du-dehors aussi dite « golf des bois » ou des activités d’expression à base d’éléments naturels. Nous apprenons à reconnaître l’arbre à fusain (hé oui, il en existe au Centre Culturel Marcel Hicter !) et à en fabriquer. La journée se finit par un retour sur le vécu des activités, des moments d’échanges et de formalisation.
Nous saluons Empreintes et continuons notre réflexion, par l’écriture de slams.
Le dimanche se déroulera à l’intérieur et sera l’occasion de stimuler l’échange autour de citations affichées (activité de positionnement dans l’espace), de débats mouvants et de moments de réflexion et
d’échanges. Que pouvons-nous retirer de ces deux jours ? Quoi de neuf pour les CEMÉA ? En effet, si nous ne sommes pas reconnu-e-s en tant que tel-le-s comme acteurs- actrices de l’ÉrE /1, depuis notre création cependant, notre action implique de mettre des individus en question et en relation avec ce qui les entoure.
« Notre action est menée en contact étroit avec la réalité. Le milieu de vie joue un rôle capital dans le développement de l’individu » /2
Par ces principes qui guident l’action des CEMÉA, Gisèle De Failly nous rappelle que tout acte d’éduquer se situe dans un contexte particulier. La responsabilité de l’éducatrice et de l’éducateur est alors de tenir compte de ce contexte. Si aujourd’hui, prendre soin de notre planète et arrêter la destruction du vivant est capital, il ne s’agit pas de transmettre la responsabilité des générations précédentes aux générations à venir. Sinon, l’instrumentalisation et la démagogie sont inévitables.
Pour qu’un lien émotionnel cognitif puisse s’instaurer entre les individus et leur milieu, ceux-ci doivent pouvoir l’éprouver, le fouler et non pas l’ériger en objet de fascination ou de domination.
C’est dans la création de cette relation nécessaire que pourront se construire des citoyen-ne-s critiques, capables de comprendre et de vivre en harmonie avec le vivant. La responsabilité qui nous incombe, en tant qu’actrices et acteurs de l’Éducation, est d’éveiller et de susciter un rapport au monde et à ses limites, ses fragilités, qui reste joyeux, curieux et non pas emprunt de peur ou de mysticisme.
Expliciter ou faire vivre ?
La Fabrique d’idées 2021 aura été l’occasion de mettre en pratique l’éducation active sur nous-mêmes, pour faire émerger le débat. Tout le week-end s’est créé en cheminement : partir de soi, de ses propres repré- sentations de l’environnement, pour les confronter aux autres et se mettre en action collectivement. C’est là le rôle de l’Éducation populaire dans la transition écologique. Car si les thématiques des crises sont rentrées dans la conscience collective, les lieux de parole et d’écoute partagées sur ces questions sont rares. Quelle
prise en compte des émotions des personnes concernant l’écoanxiété /3 ? Comment passe-t-on de la conscientisation à l’action collective ? Comment éprouve-t-on son environnement, crée-t-on des relations intimes avec lui ?
De par l’expérimentation, la transposition ou la création d’activités, nous avons pu susciter le désir de mettre en action. Au sortir du week-end émerge l’idée de créer un groupe de travail, une « mission transversale » qui pourrait se saisir du sujet dans notre association, avec des balises et des enjeux : déclencher le besoin d’expérimenter, provoquer l’envie de transformation et d’émancipation (autant individuelle que collective), construire un rapport au monde sensible, tendre vers des actions zéro déchets, sans pour autant tomber dans l’exemplarité et un cahier des charges qui empêcherait la mise en action concrète, à cause de contraintes impossibles à rencontrer.
En résumé, nous souhaitons nous appliquer à nous-mêmes tout ce que nous souhaitons pour les autres, dans un rapport au monde et à l’environnement qui serait éducatif, avec les contradictions que peut sous-tendre cette relation. L’éducation active, ses principes et valeurs, ne peuvent que rencontrer les enjeux environnementaux de notre époque. À nous de le prouver !
[1] Plus d’information sur l’ÉrE en ligne : http://environnement.wallonie.be/ere/l-ere-c-est-quoi.html
[2] Gisèle De Failly, « Les principes qui guident notre action », Congrès de Caen, 1957.
[3] -La solastalgie ou éco-anxiété est une forme de souffrance et de détresse psychique ou existentielle causée par exemple par les changements environnementaux passés, actuels et attendus, en particulier concernant le réchauffement climatique et la biodiversité. Source : wikipédia